Depuis octobre 2018, j'anime une émission de radio, diffusée tous les 15 jours sur Campus FM. Et comme je cours toujours après le temps qui passe, je n'ai jamais pris le temps de vous en faire part ici ! Il était temps !
J'ai donc décidé de poster les chroniques que j'écris pour l'émission avec toutes les sources bibliographiques, histoire de vous en faire profiter ici aussi !
Voici donc la toute première chronique que j'ai écrite, qui évoque mon avatar, la pie bavarde et son affreuse réputation de cléptomane. C'est parti !
**************************
La pie. La pie bavarde, Pica pica de son nom latin, que l’on
connait pour ses jacassements bruyants, mais aussi pour son bel habit de
smoking, noir et blanc irisé a, comme bon nombre de ses cousins corbeaux et
corneilles, plutôt mauvaise réputation.
Elle mange de tout, comme nous, et ne dit pas
non à un peu de viande. Elle ne rechigne pas à grignoter des carcasses, les
œufs ou les oisillons d’autres oiseaux, c’est le jeu. Ce qui fait qu’elle
s’attire immédiatement et invariablement les foudres des chasseurs, les fameux "premiers écologistes de France". Je mets les guillemets. Pour des raisons
souvent bancales, bon nombre des corvidés que l’on peut trouver sur le sol
français : corneilles, corbeaux freux, geais des chênes et pies, sont
classés comme « nuisibles » et peuvent donc se faire dégommer une
bonne partie de l’année.
Pourtant, les pies sont très futées. Ce sont les seuls
oiseaux à avoir passé avec succès le test du miroir, qui tend à prouver que les
animaux reconnaissent leur image et auraient une conscience d’eux-mêmes et de
leurs corps.
Elles vivent en couple fidèle et
ont une vie sociale très riche, au cours de laquelle, les partenaires coopèrent
activement, comme pour élever les petits, construire leur nid ou défendre
farouchement leur territoire de tout agresseur.
Mais ce dont je voulais vous
parler aujourd’hui, c’était de leur réputation de VOLEUSE. Cette idée est très fortement
ancrée dans nos esprits et dans notre culture. Le célèbre opéra de Rossini
intitulé la Pie voleuse « La gazza ladra », est lui-même adapté d’une pièce de théâtre de
1815, qui reprenait les faits réels d’une tragique erreur judiciaire.
Une jeune servante de Palaiseau avait
été accusée par ses employeurs d’avoir chapardé une cuillère en argent. Malgré sa
défense véhémente, la jeune fille aurait été pendue, si l'on n'avait pas découvert, au dernier moment la cuillère manquante...dans un nid de pie !
![]() |
Une pie voleuse, d'après Hergé |
Hergé dans le tome intitulé les
bijoux de la Castafiore des aventures de Tintin nous amènera à la
même conclusion. Les pies aiment tout ce qui brille et n’hésitent pas à chiper allégrement
les objets précieux chez nous autres humains, trop imprudents. Je suis navrée
de vous l’annoncer tout de go, mais tout ceci est... Faux. Archi Faux.
Pour enfin réhabiliter les pies
et rétablir la vérité, une équipe scientifique anglaise d’Exeter s’est proposée de démontrer que les pies ne préféraient pas les objets brillants aux autres
objets . Ils ont publié leur trouvaille dans le journal Animal
cognition en 2015. Et voici ce qu’ils nous en disent !
Ils ont montré à
des pies des objets brillants et des objets non brillants, en même temps. Et
ils ont observé ce que les oiseaux choisissaient préférentiellement. Ils ont
fait le test avec 8 pies captives en labo, et avec 16 pies sauvages sur le
terrain. On leur présenta des vis, des anneaux métalliques et des petits carrés
découpés dans des feuilles d’aluminium. Tous des objets brillants. Et pour les
objets non brillants, les scientifiques ont pris les mêmes objets qu’ils ont
bombé avec de la peinture opaque, pour enlever tout côté bling bling.
![]() |
Bling-bling vs Non bling-bling |
Comme les pies sont
néophobiques, c’est-à-dire qu’elles ont peur de tout ce qui est nouveau pour
elles, ils ont rajouté de la nourriture et de bonnes noix appétissantes pour qu’elles acceptent de venir. Et
qu’ont-ils trouvé ? Les pies captives en volière, en laboratoire, n’ont pas
intéragi avec les objets, mais acceptaient de venir à côté...pour manger bien sûr !
En revanche, chez les pies sauvages, c’est une
autre histoire. Les pies mettaient plus de temps à venir manger quand il y
avait des objets à côté de la nourriture (qu’ils soient brillants ou non).
Elles en avaient peur ! Sur le terrain, un seul objet brillant a été
touché à deux reprises puis reposé très vite par un oiseau sur 64 tests,
sachant que c’était en pleine période de construction de nid, quand les oiseaux
attrapent un peu tout ce qu’ils trouvent.
Conclusion ? Les oiseaux,
sauvages et captifs, ignorent ou évitent les objets présentés, qu’ils soient
brillants ou non ! La pie de Rossini est donc définitivement
disculpée ! Cette idée reçue résulterait de notre vision biaisée à nous,
d’humains. Une pie a pu prendre un objet brillant un jour, et les humains l’ont vu et s’en sont
souvenu car ce sont des objets importants pour eux, mais ils n’ont
pas du tout remarqué les centaines de dizaine de bâtons, brindilles ou autres feuilles et bouchons plastiques que
l’animal a pu toucher et qui n’étaient pas du tout brillants.
Une belle leçon
qui nous rappelle à quel point quelques observations biaisées et des rumeurs
peuvent influencer la vision que l’on aura d’un animal, et l’impact que cela
pourra avoir sur son environnement.
Pour aller plus loin:
- Pour écouter l'émission complète dont est issue cette chronique, c'est par ici
- L'article original (en anglais) sur les pies pas voleuses : Shephard, T. V., Lea, S. E., & Hempel de Ibarra, N. (2015). 'The thieving magpie'? No evidence for attraction to shiny objects. Animal cognition, 18(1), 393–397. https://doi.org/10.1007/s10071-014-0794-4
- Un article de vulgarisation dans le journal Libération qui parle de la même étude.
- Depuis l'écriture de cet article, il semblerait qu'une autre espèce de corvidés réussisse le test du miroir, la corneille d'Inde ! Affaire à suivre !
Un jour, j'ai rencontré une pie anarchiste.
RépondreSupprimerElle etait n'etait pas que voleuse, elle remettait en question la legitimité humaine sur les bienfaits de la nature.
C'est un jour de recolte de myrtilles que j'ai fait sa connaissance, alors que nous transformions nos baies violettes en confitures et sirops. Elle etait venue se faire un festin dans nos cagettes de myrtilles entreposées sur la terrasse. Embetés que la voleuse ne nous entame trop notre precieuse recolte, nous avons donc couvert ces cagettes de toiles de jute pour les proteger de la pie.
C'etait sans compter sur sa determination a faire festin. Elle s'est mise a mettre un sacré bordel dans le quartier, elle piaillait, elle venait taper la fenetre, elle tirait sur les toiles, manquant meme de reverser notre stock. La voleuse etait devenue emeutiere, refusant d'accepter tout simplement que des humains fassent main basse sur cette delicieuse ressource offerte par la nature. Elle nous renvoyait tout simplement notre accusation de vol a la figure.
N'etant pas prets a lui faire du mal pour proteger quelques myrtilles, on a finalement consenti a lui en partager quelques unes. Elle a commencé par prendre ses habitudes chez nous, ce n'etait plus une pie voleuse, mais comme notre pie anarchiste adoptée.
Merci!😉
RépondreSupprimerNico
UNE PETITE IDEE POUR DETOURNER LA PIE DES OISILLONS ? EST DE LA NOURRIR PATES , RESTE ALIMENTAIRE ECT..... JE FAIS DU COMPOST AUTOUR DE MES ARBRES ET ILs VIENNENT REGULIEREMENTs MANGER SANS MANQUER DE METTRE DU DESORDRE au pied de mes arbres et ont meme fait un enorme nid sur un cedre de l'hymalaya
RépondreSupprimermerci pour ce documentaire
RépondreSupprimer